Un salarié en arrêt maladie est, en principe, protégé et ne peut pas être licencié pendant toute la durée de son arrêt. Pour autant, un congé qui se poursuit sur de longues semaines voire des mois, peut fortement perturber le bon fonctionnement d’une entreprise et dans ce cas, la tentation est grande de licencier l’intéressé. Découvrez les détails de cette situation :
Licenciement pendant un arrêt maladie : est-ce possible ?
Le licenciement d’un salarié en arrêt de travail est exceptionnellement permis, à la condition exclusive que le motif de licenciement soit en rapport avec un facteur extérieur qui n’est pas lié à l’absence pour maladie. Un licenciement pour ce seul motif mettrait l’employeur dans une situation de licenciement abusif et engendrerait les conséquences qui vont avec. En effet, la maladie d’un salarié ne peut en aucun cas justifier une mesure de licenciement (article L. 1132-1 du Code du travail).
Un licenciement provoqué par l’absence pour maladie du salarié peut être considéré par la justice comme :
- un licenciement nul : le salarié est en droit de réintégrer son emploi et peut également percevoir les salaires qu’il n’a pas touchés entre son licenciement et sa réintégration ; s’il ne souhaite pas réintégrer l’entreprise, il peut demander des dommages-intérêts ainsi que des indemnités de licenciement.
- un licenciement discriminatoire : si les juges estiment que le salarié est licencié en raison de sa maladie, il s’agit d’un délit pénal pouvant être sanctionné de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende (art. 225-2 du Code pénal).
Pour autant, le licenciement du salarié malade peut être envisagé, à de strictes conditions, lorsque les absences pour maladie se prolongent ou se répètent.
Arrêt maladie et absences prolongées ou répétées : le licenciement peut être justifié
Les conditions permettant le licenciement d’un salarié pendant un arrêt maladie
La forte perturbation du fonctionnement de l’entreprise est un motif pour lequel le licenciement d’un salarié en arrêt de travail peut être accepté.
Le licenciement d’un salarié pendant son arrêt maladie peut être accepté si les conditions suivantes sont respectées :
- Les absences perturbent le fonctionnement de l’entreprise (Cass. soc., 12 janvier 2016, n° 14-17.642) :
l’employeur doit inscrire dans la lettre de licenciement les raisons pour lesquelles l’absence du salarié perturbe l’organisation de l’entreprise. La perturbation peut se traduire par une surcharge importante de travail pour les autres salariés, un fort mécontentement des clients, un retard non négligeable de livraison, etc. Attention toutefois, les juges ont précisé que le licenciement ne peut être justifié qu’à la condition que les absences dues à la maladie engendrent une perturbation d’un service essentiel au sein de l’entreprise.
Même si les absences du salarié ne perturbent le fonctionnement que d’un seul service, seule la preuve que ce service est essentiel dans le cadre de l’activité de l’entreprise peut justifier le licenciement du salarié malade (Cass. soc., 23 mai 2017, n° 14-11.929). A contrario, si la lettre de licenciement énonce que les absences du salarié désorganisent le bon fonctionnement du magasin dans lequel il est affecté (et non l’entreprise), le licenciement n’est pas valable (Cass. soc., 19 mai 2016, n° 15-10.010). La fonction du salarié et ses qualifications seront analysées pour justifier que l’entreprise ne peut se passer de sa présence sans qu’elle en soit perturbée.
Le secteur et le domaine d’activité sont également importants : certains secteurs demandent des compétences spécifiques, la pénurie de main-d’œuvre peut alors jouer en la faveur de l’employeur. L’employeur peut invoquer la durée de l’absence : plus elle est longue, et plus la désorganisation de l’entreprise peut se justifier.
- Les absences engendrent la nécessité de remplacer définitivement le salarié absent (Cass. soc., 30 juin 1993, n° 90-44.165):
dans le cas où la perturbation est telle que l’employeur doit embaucher une autre personne pour occuper les fonctions du salarié en arrêt de travail, le licenciement a de grandes chances d’aboutir. Le salarié embauché pour remplacer le salarié absent doit impérativement être recruté sous contrat à durée indéterminée (CDI) pour une durée équivalente à celle du salarié remplacé. La date de l’embauche du salarié doit intervenir dans un délai raisonnable suivant le licenciement du salarié absent.
- L’arrêt de travail du salarié n’est pas consécutif à un accident du travail (AT) ou une maladie professionnelle (MP), pas plus qu’il ne doit avoir de lien avec un manquement de l’employeur à son obligation de préserver la santé et la sécurité de son salarié.
L’existence d’une clause de garantie d’emploi doit être respectée
Si une clause de garantie d’emploi est applicable à la relation contractuelle, alors le salarié ne peut être licencié avant l’expiration de la période de garantie prévue conventionnellement ou contractuellement.
L’employeur qui licencie un salarié en méconnaissance d’une clause de garantie d’origine :
- conventionnelle s’expose à la requalification de la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 23 janvier 2013, n° 11-28.303) ;
- contractuelle doit verser au salarié l’indemnité prévue par la clause. Si le montant de l’indemnité n’est pas fixé, alors l’employeur peut avoir à verser à l’intéressé, l’ensemble des salaires qu’il aurait perçus jusqu’à la fin de la période couverte par la garantie d’emploi (Cass. soc., 27 octobre 1998, n° 95-43.308).
Faute grave commise par le salarié en arrêt maladie
2 cas de figure sont à distinguer :
- Faute grave survenue avant l’arrêt de travail : l’employeur peut licencier le salarié pendant son arrêt de travail à condition que :
- la faute ait été commise avant l’arrêt ;
- l’employeur l’ait appris pendant la période d’arrêt ;
- Faute grave survenue pendant l’arrêt de travail : si le salarié commet une faute grave pendant qu’il est en arrêt, il peut aussi être licencié. Par exemple :
- s’il est jugé que le salarié trompe son employeur sur son état de santé ;
- s’il exerce une autre activité qui nuit à l’entreprise ;
- s’il effectue de lourds travaux dans son logement alors que son état de santé ne devrait pas le permettre ;
- si, bien qu’accidenté, il manque à son obligation de loyauté (Cass. soc., 20 février 2019, n° 17-18.912) ;.. etc.
La procédure à suivre pour le licenciement est alors identique à celle d’un licenciement pour faute grave intervenue sans que le salarié soit en arrêt.